Le Centre Nihtaauchin de Chisasibi pour la durabilité explore différentes avenues pour assurer l’autonomie et la sécurité alimentaires de la communauté, mariant traditions et approches contemporaines.
« Nihtaauchin signifie pousser, explique le président de l’organisme sans but lucratif, Gabriel Snowboy. Pas seulement pour une plante, mais pour une personne, une communauté. C’est un très bon mot pour ce qu’on essaie de faire. »
Nihtaauchin s’est incorporé en 2018, mais a débuté en 2014 avec le Centre d’affaires de Chisasibi, avec lequel il entretient toujours une étroite collaboration. Au fil du temps, il a aussi établi des partenariats, pour la formation notamment, avec le Centre d’innovation sociale en agriculture du Cégep de Victoriaville, l’Institut de développement durable des Premières Nations du Québec et du Labrador et même aux Territoires du Nord-Ouest, le Northern Farm Training Institute.
Contre l’insécurité alimentaire
Du jardinage au compostage en passant par la fabrication de serres la sensibilisation et la nutrition, Nihtaauchin échafaude une série d’initiatives pour pallier au prix exorbitant des denrées alimentaires et à l’incapacité des activités traditionnelles de subsistance à nourrir l’ensemble de la population, en raison des dommages créés par l’érection d’un barrage sur la Grande Rivière.
Ce barrage a eu des impacts sur la population de castor et sur la végétation qui nourrit les oies sauvages, a expliqué Gabriel Snowboy le 24 février dernier, alors qu’il était l’hôte d’un des diners-conférences autochtones de l’Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue.
D’ailleurs un de projets de Nihtaauchin vise l’observation et la restauration de la Grande.
La place des ainés
« Les ainés ne considèrent pas que l’agriculture est une activité traditionnelle, rapporte M. Snowboy, mais j’essaie qu’ils la voient comme quelque chose qui respecte la terre et qui permet d’en apprendre plus sur elle. »
Sur l’ile de Fort George, où résidaient traditionnellement les Cris de Chisasibi, étaient situés deux pensionnats indiens. « lls avaient un ferme, des champs et de petites serres, rappelle la chercheuse Iona Radu, associée à Nihtaauchin et participante à la conférence du 24 février. […] Les chercheurs locaux impliqués dans la conception du projet étaient très curieux des activités passées de Fort George. Les ainés ont été interrogés sur le début de l’agriculture, quel type de plantes et de bétail on y trouvait, quelles ont été les expériences des habitants de Chisasibi qui ont travaillé dans ces jardins. »
Un projet pilote
Associé à ce savoir, un projet pilote de production de patates et d’échalotes à Fort George est concentré dans un premier temps dans deux superficies de respectivement 26 et 13 mètres carrés. L’objectif, à plus long terme, est la production annuelle de 63 000 livres de patates. Le processus a été documenté avec notamment des entrevues avec les ainés, concernant l’impact de l’agriculture sur leur diète.
Ils ont construit leur propre serre, dans la perspective d’une transmission de savoirs aux plus jeunes générations et d’un rapprochement avec celles-ci. Cette orientation est très importante dans la philosophie de l’organisme.
Une serre
La mise sur pied d’une grande serre à Chisasibi, dans un contexte d’économie sociale, est un des projets majeurs de Nihtaauchin.
« Initialement, observe Mme Radu, selon l’étude de faisabilité, ça devait commencer en 2020. Mais avec la pandémie, tout a fermé, même la demande de financement a été mise sur pause. »
Selon M. Snowboy, la construction de la serre devrait commencer cette année.
Les deux principaux défis de Nihtaauchin, observent M. Snowboy et Mme Radu, en regard de l’ensemble de ses projets, sont d’avoir accès aux nouvelles technologie vertes et de construire les aptitudes locales par la conscientisation et la formation.
« On savait qu’il y aurait beaucoup de défis, c’est pour ça qu’on a commencé petit », de dire Gabriel Snowboy.
Vers un programme de formation
Un sondage a d’ailleurs été effectué en vue de l’éventuelle création d’un programme de formation agricole. Les personnes ont été sondées sur leurs modes pédagogiques favoris, leurs habitudes alimentaires, etc.
Selon différentes sources de statistiques, l’insécurité alimentaire est beaucoup plus répandue chez les Autochtones que chez la population canadienne en général; le phénomène est particulièrement fort dans le Nord.