Santé reproductive: Le projet PAROLES a besoin de la voix des femmes de la région
Le Laboratoire de recherche sur la santé reproductive et les violences de l’Université du Québec à Montréal a lancé le projet « PAROLES - Pluralité et Amplification des voix pour le Respect dans les soins Obstétriques et gynécologiques », une étude sur trois ans pour faire l’état de la situation des soins gynécologiques et obstétriques au Québec. Pour avoir l’heure juste, le premier volet de l’étude consiste en un sondage auprès des femmes québécoises et l’équipe de recherche souhaite recueillir les témoignages des Témiscabitibiennes.
Le sondage vise à recueillir minimalement les expériences de 2000 répondantes. À ce jour, les plus de 1200 participantes se situent principalement dans les régions de Montréal et de Québec. Le Laboratoire aimerait toutefois connaître les expériences vécues dans les autres régions de la province, par exemple dans le contexte où l’accès à différents professionnels de la santé est limité.
« Nous souhaitons avoir un échantillon diversifié de la population pour nous permettre d’avoir une vue d’ensemble sur les expériences des personnes ayant reçu des soins obstétricaux et gynécologiques au Québec dans les dernières années, afin d’améliorer les pratiques et prévenir les soins irrespectueux. Nous souhaitons entendre les voix, des femmes partout au Québec, mais aussi une diversité d’expériences : autant les soins jugés respectueux et appréciés que les soins irrespectueux », a expliqué Sylvie Lévesque, professeure au Département de sexologie de l’Université du Québec à Montréal et directrice du Laboratoire.
Elle est également chercheure responsable du projet qui consiste en une équipe de recherche-partenariale, avec les co-chercheures Isabelle Boucoiran de l’Université de Montréal, Natacha Godbout de l’Université du Québec à Montréal et Saraswasthi Vedam, de la University of British Columbia. De plus, le Regroupement Naissances Respectées et le Groupe pour le Mouvement pour l’autonomie dans la maternité et pour l’accouchement naturel soutiennent le volet recherche en tant que partenaires.
Plus de respect
Au cours des années passées à travailler dans le domaine, la chercheure a constaté que dans le milieu communautaire on rapportait souvent des expériences où les femmes, dans un contexte de soin obstétrical ou gynécologique, ne se sentent pas respectées. Du côté du personnel soignant, elle a observé un déni de l’existence de comportements irrespectueux envers les patientes. En parallèle, les stérilisations forcées rapportées par des femmes autochtones partout au pays ont mis à jour l’importance de mener une étude qui initierait un changement nécessaire.
Une étude menée auprès de 1333 Britanno-Colombiennes a également révélé que 1 femme sur 10 se serait sentie contrainte à accepter les soins suggérés par le personnel soignant, sans avoir pu poser des questions ou aborder ses préoccupations.
« Les expériences varient selon le contexte de soin, par exemple on ne prend pas le temps de demander le consentement avant de poser un geste médical ou de l’expliquer à la patiente. Ça peut être d’ordre physique et psychologique quand on parle de violence, comme des commentaires déshumanisants, dénigrants sur le corps de la personne. On parle aussi de manquer de respect en ne répondant pas aux questions, de faire comme si la personne n’était pas là ou de ne pas respecter l’intimité, par exemple en arrivant à huit dans la salle d’examen sans consentement », a précisé Sylvie Lévesque.
Une question de perception
C’est difficile de caractériser une violence gynécologique puisque la perception varie beaucoup d’une patiente à l’autre et que certaines façons de faire ont été normalisées avec le temps. C’est là que le deuxième volet de l’étude entre en jeu avec des entretiens individuels avec les répondantes volontaires qui permettront de bien saisir leurs perceptions. Ensuite, dans un troisième volet, des rencontres avec le personnel soignant seront effectuées pour compléter l’étude.
« Pour certaines c’est très clair qu’elles ont vécu du non-respect mais ce n’est pas toujours une évidence. Souvent, elles savent qu’il y a quelque chose qui cloche mais n’arrivent pas à mettre le doigt dessus. Elles se disent c’est ce que j’ai vécu mais je ne trouve pas les mots pour le décrire. Elles en sont conscientes, mais ne peuvent pas le nommer. Pour les violences obstétricales c’est encore plus difficile à identifier parce que c’est souvent minimiser. Par exemple, on va dire à la mère qui vient d’accoucher que c’est pas grave ce qu’il s’est passé parce que regarde tu as un bébé en santé », a ajouté la chercheure en précisant que le sujet est toutefois de moins en moins tabou et qu’il y a plus de témoignages qu’avant, notamment sur les réseaux sociaux.
Le but de la recherche est de pouvoir présenter des recommandations, adaptées à chaque région, pour améliorer les soins gynécologiques et obstétricales prodigués aux femmes dans la province.
« On voudrait pouvoir dire aux directions de santé publique voici ce qui est possible d’améliorer, voici ce qu’on peut faire pour avoir des soins qui respectent les femmes. Les ordres professionnels sont là pour épauler. On voudrait rallier aussi le personnel soignant avec les groupes de soutien aux femmes pour arriver à des résultats. L’idée n’était pas de s’opposer. On n’y arrivera pas si on s’oppose l’un à l’autre. On est prêt à travailler », a conclu Sylvie Lévesque.
La collecte de données se termine le 31 décembre prochain. Vous pouvez témoigner de votre expérience personnelle en répondant au sondage. Cliquez ici.