Jeudi, 21 novembre 2024

Critique du film Amos vous raconte : Les coulisses d’une décennie d’histoire

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Anthony Paquette
Anthony Paquette
Critique Cinématographique
Cinéma Amos, lors de l'avant-première médiatique.
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Le 25 avril dernier, a eu lieu l’avant-première d’Amos vous raconte : Les coulisses d’une décennie d’histoire (2024). Réalisé par Marc-Antoine Jodoin et Michelle Beaudoin, le documentaire retrace la 10e et dernière année de la troupe des Productions du Raccourci dans la pièce de théâtre déambulatoire, Amos vous raconte son histoire.

Un film pour les initiés ?

Sous le format documentaire, on explique les origines de la production avant de suivre la troupe pour son dernier été. Ensuite, on rencontre quelques personnages importants de la pièce dont Hector Authier, Amos ou le Capitaine. Finalement, on voit la troupe se dire au revoir.

Pour écrire cet article, je me dois d’être totalement transparent et vous dire que je n’ai pas vu la pièce. Par contre, je peux apporter un œil critique externe. Le film est sous-titré en anglais, en espagnol et en anishnabe pour atteindre un public plus large que la région. Il vise une sortie en ligne, donc je risque de ne pas être le seul qui ne l’ait pas vu. Le documentaire veut promouvoir la culture régionale, ce qui est extraordinaire. Toutefois, il se peut que pour comprendre l’entièreté de l’œuvre, il faille avoir vu la pièce. Cela n’empêche pas d’avoir un plaisir lors de l’écoute du documentaire. Ce film reste un documentaire, donc il donne assez d’informations pour ceux qui n’ont pas vu la pièce.

Dans la salle, il y avait des gens qui jouaient dans la pièce, des commanditaires importants et de vrais fans du projet. Personnellement, j’ai eu l’impression d’avoir manqué des références ou d’avoir échappé quelques informations. Important de mentionner, que je n’ai pas eu un mauvais moment. Le film est dans son contenu réellement très intéressant, dans ce qu’il veut raconter. J’ai même vraiment apprécié de voir des endroits emblématiques d’Amos et des personnes qu’on connaît tous. 

Un film bien de chez nous

Honnêtement, c’est un royal plaisir de voir les gens de notre communauté briller à l’écran. On y retrouve des personnalités bien connues d’Amos parler de leur expérience lors de la production de la pièce. De la voix de Mathieu Higgins au maire Sébastien d’Astous, en passant par Pascal Bélanger, le documentaire donne la parole à toutes sortes d'acteurs qui ont participé à la pièce de près ou de loin. Le film veut montrer la communauté et le fait d’une excellente façon. On comprend de quelle manière un petit projet parti d’une passion pour l’histoire et le théâtre est devenue une pièce importante de la culture régionale et a rassemblé une communauté de passionnés. L’une des actrices, Joanne Forest, à expliquer lors des questions-réponse : 

Pour moi Amos vous raconte, c’est un peu la naissance de l’abitibienne en moi. Parce que j’suis arrivée en Abitibi en 2017, en février, et en avril, je m’incrustais dans la troupe d’Amos vous raconte sans du tout savoir dans quoi je m’embarquais. (...) Tous les gens que je connais, tous mes amis, toute, ça vient vraiment de la troupe de la Production du Raccourci, de toutes les opportunités que j’ai eu avec eux. Si j’étais pas venue aux auditions d’Amos vous raconte cette année-là, j’pense pas, j’sais pas si je serais encore en Abitibi. Vous m’avez créé un besoin de rester ici.

Par cette déclaration, on voit bien l’esprit communautaire de cette troupe. Le film montre comment le projet a permis à plusieurs personnes de trouver une communauté et une famille. Dans le cas de Forest, la pièce lui a permis de rencontrer des gens et de l’aider dans son processus d’inclusion sociale.

Le film fait également sa part pour montrer l’influence de la pièce sur ses acteurs. Plusieurs comédiens parlent de leur attachement pour la pièce, leur amour pour l’histoire de la ville, ainsi que pour leur personnage. On ressent un réel amour pour leurs personnages et leurs collègues. C’est ce qui fait le cœur d’Amos vous raconte.

Inclusion de tous 

La créativité inspirante de Véronique Larouche-Filion permet l’inclusion de tous ceux qui veulent participer au projet. C’est le cas de Mélanie Kistabish, une femme autochtone qui participe à la production. Depuis la 7ᵉ année, elle a participé à la création. Dans le documentaire, elle explique que Youri, le fils de son frère Malik, lui a dit qu’il allait être dans la pièce. Elle lui a répondu : “Amos vous raconte? Ça ne parle pas de ‘toé’ ça, pourquoi tu ferais ça?” Elle raconte par la suite comment la production a été très ouverte à inclure des personnages de la communauté d’Abitibiwini. 

Lors de la première, elle était vêtue de mauve en l’honneur de Joyce Echaquan. Une couleur utilisée pour manifester contre le racisme systémique vécu par cette dernière juste avant son décès tragique. En 2020, Joyce meurt à l’hôpital sous une pluie d'insultes racistes. En discutant avec Kistabish, elle m’a dit ce que Joyce Echaquan faisait pour sa communauté, combien elle était une figure inspirante pour sa communauté. Amos vous raconte permet de donner la parole à la communauté de Pikogan.  

Contenu et contenant

Bien que dans son contenu, le film est très intéressant pour les passionnés de culture, d’histoire et d’art. La technicité du documentaire de Bojo’s Film a ses limites. Je ne pensais pas que ce film allait révolutionner le genre du documentaire et ce n’est pas le but. Mais il y a des moments où le film me faisait grincer des dents. 

Pour commencer, la musique est forte. Parfois, on ne comprend presque pas quand les comédiens parlent. Surtout qu’il n'y a jamais de temps mort avec la musique. Lorsqu’une musique se termine, une autre commence. Les silences sont primordiales dans le documentaire, ils permettent de mieux faire passer une information importante. 

Ensuite, les descriptions des intervenants ne sont pas toujours bien utilisées. Oui, c’est un détail technique et très inutile pour plusieurs, car ce n’est pas tout le monde qui lise les informations. Mais à plusieurs reprises, on voit des gens parler sans informations pour les identifier. Elles ont le temps de parler à plusieurs reprises sans qu’on sache qui elles sont. Il est important de comprendre qui est la personne qui parle dans un documentaire et pourquoi elle est là. Puisque cela valide la pertinence de celle-ci.

Par exemple, on voit plusieurs fois les acteurs Mathieu Higgins et David Ebacher, du début à la fin. Mais on ne sait pas qui ils sont ni ce qu’ils font pour la production avant la moitié ou la fin du film. Pour certains, ce n’est pas grave, car ils ont vu la pièce ou les connaissent parce qu'ils sont impliqués dans la communauté. On apprend par leur intervention ce qu’ils apportent à la pièce.

Un autre exemple, Pascal Bélanger, gérant de service à l’Hôtel des Eskers et St-Hubert, parle de l’importance de la pièce pour la ville. Il a un chandail du St-Hubert et on reconnaît le restaurant. Quelqu’un qui ne connaît rien à la pièce ou ne vient pas d’ici peut se demander pourquoi il est là ? C’est qui lui ? Pourquoi filmer dans un St-Hubert ? Ont-ils demandé au cuisinier son avis sur la pièce ?

Je le reconnais, ce sont des détails, mais pour viser un public hors Amos, c’est vraiment important de bien utiliser la base première des descriptions des intervenants. On les met une fois, quand on voit l’interlocuteur pour la première fois. L’intertitre ne doit pas rester sur le plan suivant et on ne le remet pas du film. 

Dernier détail qui m’a un peu accroché, ce sont les « zoom-out » en post-production sur les photos. Le mouvement pareil pour l’œil et il semble faux. Il y a plein de technique pour éviter ces erreurs comme une échelle de plan moins intense ou simple des clés d’adoucissements. Ce sont des détails encore une fois, mais mettre une clé de mouvement sur un logiciel de montage, c’est important. C’est ce qui différencie une compagnie de production d’un « TikToker ». Pour un budget de 200 000$, c’est important de ne pas faire des petites erreurs techniques de débutant. 

Conclusion

En conclusion, malgré des choix artistiques douteux par moment, le documentaire est intéressant dans son contenu. Les fans de la pièce seront ravis, les partenaires seront contents, même ceux qui n’ont pas eu la chance de voir le spectacle trouveront plaisir à le voir. Voir une communauté aussi soudée est vraiment impressionnant. Personnellement, j’ai eu envie de participer à la troupe et j’ai aussi eu beaucoup plus de regret de ne pas l’avoir vu. 

Le film permet de faire rayonner la communauté de la région. Voir le centre-ville d’Amos sur un grand écran est incroyable pour un Amossois, mais je me demande si cela procurera le même effet à Rouyn-Noranda. Par exemple, lorsque les Huskies ont gagné la Coupe du président en 2019, un documentaire réalisé par Martin Guérin est sorti. Un peu dans la même vague, mais avec un budget beaucoup plus modeste. Brothers for Life: Mémoires d'une saison (2019) permet de retrouver des lieux emblématiques de la ville et ce fut incroyable pour plusieurs Rouynorandiens et fans de hockey. Les deux films ont des similitudes, les deux racontent un moment historique pour leur ville respective et les deux montrent la communauté rassemblée par une passion commune. Mais ces films ont une différence de budget de 173 000$ pour des résultats similaires.

Pour regarder le documentaire, ne manquez pas le lancement au Cinéma Amos le 3 mai à 19h. La tournée se poursuit à La Sarre le 6 mai, Rouyn-Noranda le 8 mai, Val-D'or le 9 mai, ainsi qu’à Lebel-sur-Quévillon le 19 juin, tous à 19h.

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