Mardi, 29 avril 2025

Projet de loi 97 : Nos forêts au cœur du débat

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Christian Péloquin
Christian Péloquin
MédiAT
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La ministre des Ressources naturelles et des Forêts, Mme Maïté Blanchette Vézina, a déposé le projet de loi no 97 la semaine dernière. Si certains se réjouissent de cette initiative, d'autres s'y opposent fermement, marquant ainsi le début d'un nouveau bras de fer.

Ce projet vise principalement à moderniser le régime forestier. Comme nous le savons, la forêt est essentielle et constitue un moteur économique majeur pour la province. En effet, 83 % des municipalités du Québec en bénéficient, représentant environ 57 000 emplois. Dans la région de l’Abitibi-Témiscamingue, la forêt est l'un des piliers fondamentaux de notre économie.

Face à la situation actuelle avec les États-Unis, notamment l'éventualité d'inclure des tarifs douaniers et les incertitudes économiques qui en découlent, le gouvernement Legault cherche à assouplir le régime forestier, déjà affecté par les changements climatiques. Cependant, ces modifications pourraient avoir des conséquences pour ceux qui ne sont pas favorables à ces changements.

L'Union des Municipalités du Québec (UMQ) se dit favorable au projet de loi 97, signalant que certaines de leurs demandes ont été entendues. Parmi les avancées positives, l’UMQ souligne :

*L’introduction d’un nouveau zonage pour concilier les différents usages du territoire forestier public ; *La prévisibilité de la récolte forestière sur une période de dix ans ; *L’intégration des changements climatiques dans le modèle d’aménagement ; *La volonté d’assurer une planification pour l’ouverture, l’entretien et la fermeture des chemins multiusages.

Cependant, l'UMQ soulève également des points de vigilance nécessitant une analyse approfondie :

Le rôle des municipalités dans la définition du zonage du territoire forestier public ; Les modifications apportées aux délégations de gestion du territoire aux MRC ; *Les modalités de financement de l’entretien des chemins multiusages.

De son côté, la Société pour la Nature et les Parcs (SNAP Québec) perçoit le projet d'une manière différente. Selon eux, cette réforme représente un recul significatif sur plusieurs acquis, offrant plus de liberté à l’industrie forestière au détriment de la conservation de la biodiversité et de la consultation publique. Ils estiment que les aires protégées sont menacées, et que le manque de consultation pour la désignation des zones d’aménagement forestier prioritaires est préoccupant.

« C’est deux poids, deux mesures, déclare Pier-Olivier Boudreault, directeur de la conservation à la SNAP Québec. La création de zones dédiées à l’aménagement forestier intensif constitue pourtant un changement de vocation du territoire aussi important que la mise en place d’une aire protégée. Les règles devraient être les mêmes. » 

La SNAP Québec prévoit d'assister à l'étude du projet de loi en Commission parlementaire pour proposer des améliorations à la réforme du régime forestier.

De plus, les Premières Nations Anishinabe de Lac Simon et Atikamekw de Wemotaci s’opposent catégoriquement au projet de loi 97, déposé le 23 avril dernier à l’Assemblée nationale du Québec, visant à « moderniser » le régime forestier. Elles estiment qu'aucun dialogue n'a eu lieu avant l'élaboration de cette réforme, la qualifiant d'attaque contre leurs territoires et leurs droits. Selon elles, trop de terres seront cédées à l’industrie forestière, entraînant une zonage en faveur d'une vocation industrielle prioritaire.

« C’est une tentative de dépossession territoriale massive, maquillée en réforme administrative. C’est inacceptable. Nous demandons la révision immédiate de ce projet de loi. Autrement, nous sommes prêts à utiliser tous les moyens à notre disposition pour empêcher que cette réforme se concrétise », affirme Lucien Wabanonik, Chef de la Nation Anishnabe de Lac Simon.

« Nous faisons face à une version contemporaine du colonialisme : cette fois, on efface nos voix avec des lois, pas avec des bulldozers, mais le résultat est le même », de conclure Jon-Evan Quoquochi, Vice-Chef du Conseil des Atikamekw de Wemotaci.

En somme, ce projet de loi semble provoquer des divisions. Est-il opportun de se diviser face aux défis imposés par l'administration américaine ? Une chose est certaine, nous ne sommes pas sortis du bois.