Dimanche, 29 juin 2025

Une amossoise remporte la médaille d'or de la Gouverneure Générale

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Véronique Lemay
Véronique Lemay
MédiAT
Crédit photo : Louis Jalbert
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Claudie Audet, travailleuse sociale et étudiante au doctorat Recherche en science de la santé à l’UQAT, s’est vu remettre une distinction toute particulière en mai dernier. En effet, elle a reçu la médaille d’or de la Gouverneure Générale du Canada. Cette médaille est remise à l'étudiant(e) à la maîtrise ou au doctorat s'étant le plus démarqué par ses résultats scolaires, son impact dans le domaine de la recherche et son implication sociale.

Cette maman de deux jeunes enfants travaillait à temps plein lorsqu’elle a eu envie de s’inscrire à la maîtrise à temps partiel. « En tant que maman, on pense que c’est impossible. On se sent coupable de réaliser nos projets alors qu’on devrait être avec nos enfants. Si mon parcours peut servir d’exemple pour tous les parents qui souhaitent réaliser un rêve mais qui pense que ce n’est jamais le bon moment, tant mieux. Il n’y a pas de bon moment. Il faut le faire maintenant! ».

L’histoire de Mme Audet est certainement inspirante. C’est d’ailleurs grâce à une discussion impromptue qu’elle a eu le courage d’aller de l’avant avec son projet d’études universitaires, qu’elle remettait toujours à plus tard. Voici un résumé de notre entretien :

Comment as-tu réagi quand on t’a annoncé que tu avais gagné la médaille d’or de la Gouverneure Générale?

J’ai reçu un appel de la secrétaire générale de l’université qui me disait avoir de bonnes nouvelles pour moi, de la rappeler. J’ai tout de suite compris de quoi il s’agissait. J’ai réussi à lui parler seulement le lendemain, et lorsqu’elle m’a confirmé la nouvelle, je ne savais pas quoi dire! Je pleurais au téléphone!

Qui a posé ta candidature?

Quand une université est inscrite pour le concours, chaque département doit mettre en nomination leur meilleur étudiant. Ma directrice m’a annoncé au printemps que c’est ma candidature qui serait soumise. En à peine quelques jours, je devais composer une lettre de motivation, mettre mon CV à jour et composer deux pages sur ce que j’ai apporté au projet de recherche. Le tout devait être accompagné d’une lettre d’appui de ma directrice et d’une résolution de l’assemblée départementale. Ensuite, un comité formé du recteur de l’université, d’anciens professeurs et de la secrétaire générale de l’université étudie les différents dossiers reçus et choisis qui recevra la médaille.

Étais-tu prédestinée à de grandes études universitaires?

Pas du tout! Je n’ai jamais été super bonne à l’école. Pour te donner une idée, j’ai coulé mes mathématiques de secondaire 5! Après mon secondaire, je suis allée faire mon DEC en musique à Drummondville. J’aime jouer de la musique mais je me suis rendu compte que je ne souhaitais pas faire carrière là-dedans, c’est trop compétitif. J’ai donc pris le temps de réfléchir à mon avenir professionnel. J’ai travaillé pendant deux ans, j’ai voyagé en Europe. C’est finalement le travail social qui m’a attiré. J’aimais le fait que c’est un travail altruiste et diversifié. J’ai d’abord été refusée au BAC à Québec. Je me suis donc inscrite dans un autre programme pendant un an dans le but de faire monter mes notes. L’année suivante, j’ai été admise en travail social. J’ai terminé mon BAC en 2013, puis je suis revenue en région. 

Qu’est-ce qui t’a ensuite poussé à poursuivre ton cursus scolaire?

Déjà au BAC, j’aimais les cours de recherches. Mais je trouvais important d’être sur le terrain avant d’approfondir des recherches sur le domaine. J’ai donc travaillé dans plusieurs secteurs des services sociaux à Amos, Senneterre et Pikogan. J’ai eu ma première fille en 2014, puis je me suis inscrite à la maîtrise en 2015. J’ai arrêté en 2016, je me sentais trop coupable de m’investir dans autre chose que dans mon rôle de mère. J’ai donc continué à travailler et j’ai eu ma deuxième fille en 2017.

Qu’est-ce qui a été ton déclic pour finalement poursuivre ton rêve?

Une discussion avec une collègue. Elle m’a confié qu’elle avait réussi à faire son BAC en 15 ans à temps partiel en étant mère monoparentale. Elle m’a fait comprendre que ce n’est pas négatif, au contraire. C’est à nous de le voir positivement et nos enfants le verront positivement aussi. Elle m’a dit que ses enfants, maintenant adultes, n’ont aucun mauvais souvenir de leur mère qui étudiait. J’ai compris à ce moment que tout est possible.

J’ai donc contacté la directrice des programmes de recherche en sciences de la santé, Anaïs Lacasse, qui est ma directrice aujourd’hui. Elle m’a fait rencontrer plusieurs enseignants, elle m’a parlé des possibilités, mais c’était clair que c’était avec elle que je voulais travailler! Ses recherches étaient en lien avec la consommation de cannabis pour traiter des douleurs chroniques, je trouvais ça vraiment intéressant. Elle n’a pas accepté tout de suite de me diriger, elle m’a d’abord demandé de compléter un cours sur la méthodologie de la recherche en tant qu’étudiante libre. Elle m’a ensuite admise à la maîtrise en janvier 2021. J’étudiais à temps partiel puisque je travaillais encore 35 heures semaine. J’ai terminé ma maîtrise en juin 2024. C’est ma directrice qui m’a permis de vivre toutes les belles expériences que j’ai vécu durant la maîtrise, c’est elle qui m’a mise de l’avant. Elle m’a permis de publier des articles scientifiques comme 1e auteure, ce n’est pas tous les étudiants à la maîtrise qui ont cette opportunité. Elle m’a offert du soutien financier pour aller dans des congrès en-dehors du Québec et même du Canada.

J’ai débuté mon doctorat à temps plein depuis. 

Comment on arrive financièrement à être au doctorat à temps plein quand on a une famille?

J’ai eu la chance de recevoir une bourse d’étude supérieure du Canada qui me permet de ne pas avoir à travailler pendant mon doctorat. Je ne pensais jamais faire un doctorat dans ma vie, je n’ai jamais rêvé à ça! Mais j’ai l’impression que plus j’avance, plus c’est facile. La recherche, c’est différent comme études. Ce n’est pas du par cœur.

Est-ce que le fait de gagner une telle distinction change quelque chose dans ton parcours?

Disons que ça parait bien dans un CV pour l’obtention d’un poste d’envergure! C’est vraiment une belle dose de confiance. J’ai douté beaucoup au début de mon parcours de doctorat. J’avais le syndrome de l’imposteur. Je me disais qu’un doctorat c’était pour ceux qui sont bons à l’école! Moi je n’avais pas de mauvaises notes, mais je n’étais pas dans les « bolés » non plus. 

Qu’est-ce qui t’attend après le doctorat?

Aucune idée! J’aimerais beaucoup être professeure à l’UQAT, mais les postes ne pleuvent pas. C’est certain que l’expertise que j’ai acquise peut être intéressante pour des entreprises à l’extérieur de la région avec lesquelles je pourrais travailler à distance. Disons que j’essaie de ne pas me stresser avec le après!

Quel est le message que tu souhaiterais passer aux parents qui ont de grands rêves comme les tiens mais qui n’osent pas les réaliser?

Il n’y aura pas de meilleur moment. Que ce soit pour des études ou pour d’autres projets. Même si on pense que ce sera un meilleur moment plus tard, il peut arriver des imprévus qu’on n’aura pas vu venir. Il faut surtout arrêter de culpabiliser comme parent. Si tu t’épanouis, au final, toute la famille est gagnante. Et c’est aussi l’occasion pour le partenaire de vie de se mettre de l’avant comme parent.

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Médaille de la Gouverneure Générale du Canada : cette haute distinction académique est offerte à quatre niveaux différents : le bronze aux diplômés du secondaire, le bronze collégial pour les diplômés du collégial, l’argent aux diplômés du premier cycle universitaire et l’or aux diplômés des deuxièmes et troisièmes cycles universitaires. Cette médaille est remise au nom de la gouverneure générale par les établissements d’enseignement participants, en même temps qu’un certificat personnalisé signé par la gouverneure générale. Aucune récompense en argent ne l’accompagne.